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Le Jeu des petites gens en 64 contes sots par Louis Delattre : Les deux frères

Un étranger arrive au village, à la recherche d’un paysan.
Il entre chez Pierre Jadin, au cabaret voisin de la gare ; et, au comptoir, en payant sa chope :
- N’y a-t-il pas dans le bourg, demande-t-il au cabaretier, un appelé André Jadin ? J’ai des papiers à lui remettre, et je ne sais où est sa maison ?

 

- André Jadin ? répète l’homme. André Jadin ?... J’ai déjà entendu ce nom-là... Mais on parle de tant de gens, ici... Non, pour un du village, je ne me le rappelle pas... Vous savez, il n’y a tout de même que la route à suivre pour voir toutes les maisons. La localité n’est point grande...

L’étranger sort. A un autre café, il renouvelle sa question.

- Pardienne, André Jadin ! répond ce cafetier. Je ne connais que lui !

Il entraîne le voyageur sur le seuil, et avec de grands mouvements des deux bras, il lui explique en long et en large qu’il trouvera mon dit Jadin au haut de la côte, dans la campagne du « Lièvre Courant », à la petite ferme blanche entre les deux peupliers. Un quart d’heure d’ici, quoi !

En effet, l’homme est trouvé ; et sa commission faite, l’étranger s’en revient prendre le convoi.

Il a quelques minutes de reste, et il entre au cabaret de la Station.

- Vous savez, dit-il au patron qu’il a tantôt consulté vainement, j’ai trouvé mon individu. C’est le fermier du « Lièvre-Courant ».

- Nom de d’là ! crie l’autre, avec un haut-le-corps. Mais c’est mon propre frère ! Que ne me demandiez-vous tantôt André du Lièvre-Courant ? Je vous l’aurais dit tout de suite !

Bien sot qui ne sait son nom.